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Lecture de Creativity inc., par Ed. Catmull

Article mis à jour en novembre 2022.

À la lecture d'un grand classique de la littérature, est souvent associée la recherche des ingrédients du succès, l'envie de comprendre les raisons objectives de sa différence. Il en va de même pour un classique du monde des affaires. La valeur de l'authenticité est le point commun entre les deux univers, littérature et affaires (au delà du fait que vendre de la littérature relève d'un savoir-faire d'entreprise). Ed. Catmull est crédible car il raconte sa propre histoire et celle de ses collègues et partenaires, tout en sachant qu'il sera lu par l'ensemble des protagonistes de la saga Pixar et qu'il n'a donc pas droit à l'erreur. L'entreprise qui produit des histoires a elle-même une sacrée histoire. Les notes de lecture qui suivent sont le résultat d'une démarche de synthèse. Les grands thèmes de l'ouvrage sont décrits et analysés dans ce qu'ils ont d'essentiel.

Une culture d'horizontalité

Chez Pixar, la hiérarchie au sens classique du terme est considérée comme un obstacle. Même si elle subsiste comme dans toute organisation dotée d'une capacité d'investissement et donc d'une espérance de retour sur investissement, elle est focalisée sur l'essentiel : le management de l'innovation, en particulier la priorisation des idées qui feront l'objet d'un projet concret et le plus souvent ambitieux. Priorisation et non génération, sélection, enrichissement, prototypage, test pilote ou industrialisation, car ces fonctions-là sont le fait de tout un chacun. Le sacro-saint principe consistant à autoriser chaque employé à parler à n'importe quel autre employé, quel que soit son niveau ou quelle que soit son ancienneté, est constamment affirmé, réaffirmé et démontré par l'exemple. Car la circulation d'une idée est le meilleur moyen de la rendre plus forte, de renforcer son potentiel et in fine de le réaliser.

La force du scénario

On aura beau réunir les meilleurs spécialistes de l'animation, de la simulation en 3D, de la réalisation, du son, de toutes les disciplines clés du métier, il n'est pas possible de faire un bon film si le scénario est mauvais. En revanche, si le scénario est bon, il faut maximiser ses chances de devenir une oeuvre mémorable en mobilisant les meilleurs experts. Comment ? En répondant aux attentes des experts, typiquement un management basé sur la confiance. Donc réussir dans le cinéma d'animation revient à écrire un bon scénario et à manager en confiance. On ne peut que penser au fameux film Le stratège de Bennett Miller, produit par Columbia Pictures, avec Brad Pitt dans le rôle d'un manager d'équipe de base ball donnant la priorité à l'efficacité de groupe sur la valeur individuelle.

Le style direct

Un facteur de performance essentiel d'une entreprise est de s'appuyer sur des vérités solides pour bâtir ses méthodes, ses processus et ses projets. Pour ce faire la combinaison d'un style de communication direct, d'une culture d'objectivité, d'une habitude de questionner sous plusieurs angles permet d'éviter de faire prospérer des idées fausses voire des dénis de réalité. Cela rejoint les principes bien connus des techniques de résolution de problèmes (par exemple, les approches Lean ou d'excellence opérationnelles) : si l'on est sûr de la cause d'un symptôme, le problème est résolu à 95 %. Ainsi si l'on imagine un collaborateur dire à un autre que sur 10 projets ratés, 9 projets ont telle ou telle caractéristique (un type de personnage, une trame commune, une technique de montage, ...), rien ne vient remplacer une mesure objective, dont le résultat ne sera pas forcément consensuel. La vérité s'oppose trop souvent à l'intuition pour lui faire une confiance aveugle.

Échouer et rebondir

On apprend plus de ses échecs que de ses succès. On en déduit ici que sans prise de risque il est impossible de réaliser autre chose qu'une innovation de continuité, car la sécurité est répétition donc ancrage dans un univers connu. Pour innover en rupture, il faut donc accepter de faire éventuellement des erreurs et d'en tirer des conséquences. On pense bien entendu aux bêtises de Cambrai, les fameux bonbons créés à la faveur d'une erreur dans l'application d'une recette. Le style de management consistant à avouer ses erreurs et à les analyser en groupe, à être à la fois humble et volontaire, se prête particulièrement bien à un environnement hautement créatif tel que celui de Pixar. 

Dynamique négative et dynamique positive

Une entreprise ne dort jamais. En tendance, soit elle prend une direction vertueuse, soit elle se rapproche de l'enlisement. La vitesse d'évolution est variable mais a une réelle propension à s'accroitre sur fond d'adoption de méthodes et d'outils de travail de plus en plus pointus. L'enlisement correspond chez Pixar à la conséquence du dénigrement d'un département par un autre, la vertu au contraire représente un changement souhaitable rendu possible par la collaboration entre des profils variés. L'évolution des processus et de la culture est nécessaire pour pérenniser une entreprise, tout en conservant son identité. Un des leviers de changement vertueux est la prise de conscience de tout ce qui l'entrave, à commencer par les sentiments non exprimés voire subconscients issus de l'habitude ou d'expériences malheureuses non partagées. 

Les rites

Ces principes sont matérialisés sous la forme de réunions, évènements, déplacements, confrontations, stimulations, exercices critiques, observations, pilotes, expériences, debriefs, post-mortem et autres formations. Chacun de ces rites est codifié au niveau de l'intention plus que de la méthode, afin de ne jamais perdre de vue leurs objectifs. Ce n'est qu'avec le temps que les bonnes idées cristallisent, aussi bien les idées de films que les idées d'amélioration de l'organisation et des processus de l'entreprise. Et quand un problème de management survient, les chefs n'hésitent pas à appeler leurs troupes à la rescousse, dans un exercice d'humilité aussi efficace que rafraichissant.

Roches équilibrées

Un système de créativité

Un savant équilibre

Le plus grand mérite de ce livre et de la culture d'innovation de Pixar est la permanente recherche d'équilibre entre créativité et contrôle de la rentabilité des investissements. À chaque chapitre on sent le souci de ne pas casser la dynamique inventive de la structure, tout en repérant les éléments d'un véritable système. La promotion de l'audace dans l'innovation est elle-même un principe, une règle ancrée dans les moeurs de l'entreprise faisant partie de son référentiel. Cette règle est compensée par une autre, définissant les limites au delà desquelles l'échec n'est plus une opportunité d'apprendre et de rebondir, mais un poids tirant l'organisation vers le bas.

Une culture décisionnelle

L'apanage de la hiérarchie est la priorisation des idées. Les chefs décident. Mais avant de s'y résoudre, ils dosent le temps laissé à l'écosystème pour accoucher de projets suffisamment mûrs ou au contraire d'initiatives trop alourdies par les contraintes pour réussir. Lorsqu'ils tranchent, ils utilisent ce style direct propre à éviter les dénis, ces causes fréquentes de problèmes au sein des entreprises. Puis ils racontent une histoire d'histoire, celle du succès d'un scénario transformé en film, empruntant à leur culture profonde et durable du story telling à chaque étape de la création, de la production ou de la distribution d'une oeuvre destinée à enrichir le catalogue déjà légendaire du studio.

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